Ponce Emma

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Mis à jour le vendredi 27 novembre 2020 14:48

Titre de la thèse : "Sauver le sensible : Platon critique d’Empédocle."

Co-direction : M. Marwan Rashed (Université Paris-Sorbonne, Centre Léon Robin)

Thèse en préparation depuis juillet 2019, dans le cadre d’un contrat doctoral de trois ans (2019-2022) octroyé par l’École doctorale Concepts et langages (Sorbonne Université)

Résumé du projet de thèse :

Dans plusieurs de ses dialogues, Platon semble admettre l’existence du mal, voire sa prédominance. Il souligne néanmoins que le mal est cantonné au sensible, et qu’il n’a pas sa place parmi les dieux. La problématique n’est alors pas tant celle de la théodicée que de la cosmodicée, qui consiste à justifier la bonté du monde. L’enjeu étant, d’une part, de sauver le sensible – en défendant la possibilité pour ce dernier, bien qu’intrinsèquement mauvais, de participer à un bien optimal – et, d’autre part, de sauver le sens de la vie terrestre. Or, cette double exigence paraît trouver chez Platon son élaboration dans un dialogue et une confrontation avec Empédocle.

Celui-ci développe en effet dans le Peri Phuseôs une cosmologie cyclique dans laquelle le monde est régi en alternance par l’Amour et la Haine. Si l’action de ce dernier principe explique l’existence du mal, Empédocle s’efforce aussi d’équilibrer les puissances de l’Amour et de la Haine à travers un cycle proportionné. Cette régulation du cycle conduit à accorder une place centrale au Sphairos, qui se présente comme la finalité vers laquelle l’Amour tâche d’orienter le réel, y compris lors du règne de la Haine.

Or, d’un côté, Platon paraît transposer aux Formes la fonction polarisante que joue le Sphairos dans la cosmologie d’Empédocle, ou encore penser la participation du sensible à un bien supérieur sur le modèle des ruses de l’Amour tournant à son avantage l’action de la Haine. Mais d’un autre côté, tout se passe comme si Empédocle n’avait pas su être à la hauteur de ses propres découvertes, et cela pour deux raisons. La première réside dans l’explication empédocléenne du mal par la Haine, qui confère à celui-ci une existence positive en tant que principe. La seconde consiste dans la cosmologie matérialiste et cyclique d’Empédocle. Celle-ci ruine en effet toute cosmodicée par ses conséquences ontologiques – car le Sphairos, étant détruit périodiquement par la Haine, ne peut constituer un pôle téléologique fixe pour le réel –, et eschatologiques – car, d’une part, le séjour des Bienheureux, prenant place au sein du sensible, est affecté par le mal et ne peut donc orienter la vie terrestre, et, d’autre part, le cycle garantit la remontée vers ce séjour quelle que soit la vie menée, d’où une forme de fatalisme dans les Catharmes.

Denis O’Brien a relevé plusieurs passages empédocléens dans les dialogues de Platon. Nous entendons proposer une analyse détaillée de ces passages, et examiner en outre la confrontation avec Empédocle dans d’autres dialogues. Notre travail se donne pour tâche principale d’exposer la manière dont Platon élabore positivement sa propre cosmologie en réponse aux apories qu’il décèle chez Empédocle.